• Passagère clandestine

    ORAGES EN KARMELIE : CHAPITRE 19

     

    Flaminou Express

    Transports rapides ailés

    Tous Royaumes

     

    C'était le sixième voyage de Flaminou en Pays Troll pour y récupérer le butin accumulé par le Royaume de Karmélie, et le deuxième de cette nouvelle année. Le travail commençait à devenir routinier, et Flaminou détestait la routine. Mais il adorait l'argent.

    L'énorme Dragon couleur de feu tournait depuis de longues minutes au dessus de la zone où était censée se trouver la cache. Le paysage désolé et montagneux était monotone, et dans ce Pays où tout se ressemblait, trouver une cache n'était pas une tâche facile. Il finit par la repérer grâce à un motif de pierres disposées en étoile, bien visible depuis les airs. Heureusement que l'agent de Karmélie présent dans l'opération au sol avait eu la présence d'esprit d'envisager une approche par les airs. Tout le monde n'y aurait pas pensé.

    Il se posa au sol à proximité de l'étoile de pierres. Il se mit aussitôt à faire valser les grosses pierres à grands coups de pattes négligents pour trouver la cachette du trésor.

    - Ah le voilà !

    Il venait de balancer à une vingtaine de mètres une énorme souche de sapin sous laquelle se trouvaient cinq énormes coffres, dans un trou peu profond. Flaminou renifla les coffres et sentit immédiatement qu'il y avait anguille sous roche. Il décida de s'amuser un peu, le Dragon n'étant jamais le dernier pour une partie de rigolade.

    Il ouvrit le premier coffre et s'écria : 

    - Oh, de l'or, quelle surprise ! Le grand Argentier va être content !

    Il ouvrit le second :

    - Oh, encore de l'or ! Le grand Argentier va être très content !

    Le troisième : 

    - Hou les beaux bijoux ! C'est la Reine qui va être contente ! Et encore du courrier. On me prend pour la Poste Royale ?

    Le quatrième : 

    - Des bijoux et de l'or ! Quelle originalité.

    Et enfin le cinquième : 

    - Ah ! On a même pensé à me laisser un petit encas pour le vol de retour. Cette fois c'est moi qui suis content ! Mais c'est un peu maigrichon, tout de même. J'aurais préféré un petit Troll.

    - Ne me mangez pas, Messire Dragon ! s'écria la petite Gobeline terrorisée suspendue dans les airs par deux énormes griffes enserrant délicatement sa taille. Il faut que j'aille en Karmélie, j'ai un message à transmettre à la Princesse Dhâle de toute urgence !

    - Je suis désolé ma petite, mais mon contrat ne prévoit que le transport de fret, pas le transport de passagers, et je n'ai reçu aucune instruction te concernant ! Allez ouste, du balais ! dit il en la reposant au sol.

    La petite Lia, vite remise de sa frayeur à la vue de cet énorme Dragon rouge feu, décida néanmoins d'argumenter avec passion. Après tout elle n'avait pas passé seule plus d'une semaine dans un coffre en plein Pays Troll pour se dégonfler devant cette énorme bête : 

    - Messire Dragon, vous ne comprenez pas, c'est une question de vie ou de mort ! L'escouade de Gardes Royaux qui nous ont secouru, ma famille et moi, ne sortiront jamais de cet horrible pays si je ne parviens pas à prévenir la Princesse Dhâle de ce qui se passe ! La Reine les a envoyé en territoire Troll pour se débarrasser d'eux ! Et ma famille ne pourra jamais sortir de cet horrible Pays sans leur aide !

    - C'est une bien triste histoire que tu me racontes là, ma petite. Mais vois-tu, ton escouade ne s'en sort pas si mal, vu le butin qu'elle a déjà réussi à accumuler. Et je suis payé au pourcentage de ce que je ramène. Penses-tu qu'il soit dans mon intérêt de mettre fin à tout cela en t'emmenant voir la Princesse aux Mille Fleurs ?

    - Mais, Messire Dragon, vous ne comprenez pas ! La Princesse est amoureuse de Claymore, et elle n'a pas eu de nouvelles de lui depuis plus d'un an ! La Reine a envoyé toute l'escouade en Pays Troll pour se débarrasser de Claymore et pour le séparer de la Princesse ! Vous ne pouvez pas leur faire ça ! Vous devez bien avoir un coeur, tout Dragon que vous soyez !

    On dit souvent de Flaminou qu'il ne pense qu'à l'argent. C'est vrai, l'argent l'obsède. Mais on ignore qu'il a aussi un coeur d'artichaut, et que rien ne l'émeut davantage que les histoires d'amours contrariés.

    Il demanda donc à la petite des explications complémentaires sur la situation. Et la petite était douée pour transmettre ses émotions, il faut bien le reconnaître. Après plus d'une heure de détails romantiques tous plus émouvants les uns que les autres, et une fois qu'elle lui eut révélé les grandes lignes de son plan pour résoudre la situation, Flaminou mit fin à la conversation sans un mot : il sortit d'une de ses sacoches un très gros tas de cordages, noirs comme la nuit.

    Il déploya son grand filet de transport au sol sur une surface plane, puis disposa au centre les quatre coffres, en veillant à bien les fermer pour qu'ils ne s'ouvrent pas pendant le vol. Il referma ensuite le filet, et en sécurisa les trois filins d'attache à son harnais de transport, à l'aide de mousquetons spécialement enchantés pour améliorer leur résistance.

    La petite Lia, plantée à l'écart pendant que le Dragon terminait ses préparatifs de départ en silence, avait les yeux brillants de larmes contenues. Il lui restait bien quelques vivres, mais comment allait-elle faire pour rejoindre l'escouade des Gardes Royaux, partie depuis plus d'une semaine ?

    Flaminou se tourna vers elle et lui dit d'un ton peiné :

    - Je suis désolé, mais je ne peux pas transporter de passagers avec mon filet de transport de fret.  Puis reprenant, l'oeil malin :

    - Ça ne te dérange pas de voyager sur mon dos ? Je n'ai pas amené de selle, le voyage va être long et inconfortable. Et il faudra faire attention à ne pas tomber.

    La petite Lia, qui manqua défaillir de soulagement, lui répondit dans un grand rire : 

    - Non, ça ne me dérange pas, Messire Dragon ! Mille fois merci !

    - Tu peux m'appeler Flaminou, petite Lia. Allez, grimpe ! dit-il en tendant la patte. En avant pour le Château aux Mille Fleurs. Je te déposerai à quelques lieues du Château, je ne pense pas qu'il soit très sage que je te dépose avec le butin. Mais je suppose que tu sauras te débrouiller pour trouver la Princesse par tes propres moyens, lui dit-il dans un grand sourire Draconique.

    - Ne t'inquiète pas, j'arriverai bien à la trouver, Flaminou ! Si je peux traverser un continent à dos de Dragon, je peux bien trouver mon chemin dans un Château !

    Sur cette belle déclaration pleine d'assurance, le grand Dragon prit son envol. Si la petite Lia, installée sur son dos, ne pesait presque rien, la cargaison d'or était très lourde. Mais Flaminou se sentait léger. Très léger.

     

     

     Flaminou Express, le bonheur est à portée d'ailes.

    Chaud dedans, chaud devant 

    « Un plan sans accrocs, ou presqueUne tempête à l'horizon »

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